Ce qu’écrivent les Artésiennes réfugiées
De l’émouvante chronique publiée pour les Ligueuses du P.-de-C., nous détachons ces quelques passages :
Des régions les plus diverses, nous arrivent des lettres de Ligueuses, évacuées, dispersées, isolées, ruinées parfois, inquiètes sur le sort des leurs ou trop souvent hélas ! frappées dans leurs plus chères affections. Avec des nuances diverses, suivant l’origine, l’éducation, le caractère, toutes expriment un sentiment commun : l’espoir indéfectible en la victoire finale ; toutes sont admirables de foi, de résignation, de courage tranquille. […]
Les réfugiées artésiennes, où qu’elles soient, aspirent ardemment au retour dans la ville ou le village aimé…
Que retrouveront à leur retour les Ligueuses de Vermelles, où après un siège historique, tout fut rasé ? Celles de Cuinchy, dont le territoire connut tant de glorieux combats ? Celles d’Annay-sous-Lens, qui s’enfuirent une nuit, à la lueur des incendies, dans la direction de Béthune, tandis que les Allemands s’avançaient par les routes de Lille et de Carvin ; celles de La Couture, où l’église fut longtemps le point de mire de l’artillerie boche ?
Faut-il parler d’Arras ?... Au milieu de tant de désastres, la ruine aura un douloureux retentissement dans le cœur de beaucoup d’entre nous dont la jeunesse s’écoula dans ce paisible asile, sous la direction clairvoyante et avisée des éducatrices de premier ordre qu’étaient les Bénédictines de l’Adoration perpétuelle. Là-bas, en Ecosse, sur les hauteurs de Corbelly-Hill, où ces saintes religieuses sont réfugiées, les destructions sauvages de décembre 1915 renouvelleront l’amertume des sacrifices passés. […]
Dans les communes voisines, où la Ligue comptait de florissantes sections, les désastres, toutes proportions gardées, ne sont pas moindres.
Achicourt, si souvent bombardé, a perdu [censure] le 25 novembre ; Saint-Nicolas reçoit régulièrement des obus lourds ; de Roclincourt, il ne reste rien ; Saint-Laurent, partiellement détruit, est partiellement occupé par les Allemands, dont les tranchées sont toujours à un kilomètre et demi d’Arras ; sont également occupées par l’ennemi : nos sections d’Athies, de Feuchy, de Fampoux au nord de la ville ; de Mercatel, de Boisleux, de Boiry, de Boyelles, au sud.
De Bapaume, des sections y rattachées, envahies depuis seize mois, et de toute cette région, les nouvelles n’arrivent qu’exceptionnellement. Nous savons cependant que Mme Paul Deron, ex-secrétaire du Comité bapalmois, qui, avec une compétence et un dévouement au-dessus de tout éloge, dirigeait dans cette ville, une ambulance de la Croix-Rouge, a courageusement continué, après l’arrivée des Allemands, à remplir son ministère de charité.
À Maroeuil, continuellement bombardé depuis les premiers jours de novembre 1914, et presque totalement évacué par la population civile, notre vaillante présidente, Mme Mougin, a organisé un poste de secours dans sa propre maison, dès le début de la guerre. Gravement blessée par un éclat d’obus, et citée à l’ordre du jour ainsi que sa fille, Mlle Louisette Mougin, aussi bonne patriote qu’ardente Ligueuse, elle a poursuivi sous la mitraille la noble mission qu’elle s’était donnée. À notre active secrétaire, qui vient d’épouser à Luçon, un jeune officier blessé une première fois, à demi asphyxié et laissé pour mort à Tahure, enfin guéri et objet d’une glorieuse distinction, nous offrons nos meilleurs souhaits et félicitations.
La Chronique se termine ainsi :
Si, à l’effort personnel et au souci de réconfort d’autrui, nous ajoutons l’humble recours à Celui qui écoute nos prières, et se plaît à exaucer les désirs de nos cœurs, nous aurons hâté, autant qu’il est en notre pouvoir, l’avènement du jour libérateur et aidé à la reconstitution d’une plus grande France.
Une Artésienne