Le 15 novembre 1916, la Société de géographie de Boulogne propose une conférence sur "les Indes et l’effort britannique". Deux semaines plus tard, une nouvelle soirée est consacrée quant à elle à la Serbie.
L’orateur du jour est Paul Labbé (1867-1943), linguiste et ethnologue, connu pour être d’un des plus grands spécialistes de la Sibérie de son temps. De 1904 à 1919, il dirige également la Société de géographie commerciale de Paris, avant de rejoindre la présidence de l’Alliance française où il reste jusqu’en 1935. Engagé volontaire dès le début du conflit, il est rappelé en 1916 pour fonder "L’effort de la France et de ses alliés", un comité de conférences chargé de vulgariser ces thématiques auprès du grand public.
Durant la guerre, l’engagement de la Serbie est un thème récurrent d’un grand nombre de manifestations. Peu de temps avant cette intervention, le même sujet avait attiré près de 3 000 auditeurs au Victoria Hall de Genève.
Le président de cette conférence boulonnaise est Milenko Vesnić (1863-1921), homme politique et diplomate serbe, qui a également beaucoup discouru sur la Serbie durant la guerre. Après l’armistice, il compile l’ensemble de ses discours et articles dans un recueil intitulé La Serbie à travers la Grande Guerre. Représentant son pays à la conférence de paix de Paris en juin 1919, il devient également premier ministre du Royaume des Serbes, Croates et Slovènes en 1920, poste qu’il occupe jusqu’à son décès en 1921.
La conférence sur la Serbie fidèle qui sera faite par la Société de géographie le 29 courant doit être présidée on le sait par Son Excellence M. Milenko Vesnitch, ministre de Serbie. Ce n’est pas la première fois que M. Paul Labbé parle à Boulogne et ce n’est pas la première fois non plus qu’il parle de la Serbie fidèle, mais l’intérêt qu’offre une conférence faite par (Genève, St-Etienne, etc.)[sic], un des maîtres du genre se doublera le 29 de celui que nous aurons à entendre le représentant même de la Serbie qui parle aussi bien notre langue qu’il aime notre pays. La présence de M. Vesnitch au milieu de nous, au moment où Serbes et Français viennent d’entrer à Monastir, symbolise l’union profonde de nos deux peuples.
Elle évoque, comme le disait M. Morel, ancien ministre, "les souffrances cruelles, les douleurs et les épreuves terribles de notre loyale et fidèle alliée balkanique. Mais elle raffermit, en même temps, en notre mémoire le souvenir de sa glorieuse histoire écrite à la pointe de l’épée par ses héroïques soldats. Elle fortifie notre espérance commune dans la victoire prochaine éclatante et décisive, qui consacrera le triomphe des Nations libres sur la tyrannie des Empires de Proie et qui sera le prélude certain des châtiments inéluctables et des réparations nécessaires."
M. Vesnitch est l’apôtre en France de l’effort serbe et jamais il ne se reposera tant que l’heure du triomphe définitif de la France et de ses Alliés n’aura pas sonné[e]. "Il est prisonnier de lui-même, écrit M. Paul Labbé, son passé de dévouement a hypothéqué son avenir, il est un de ces hommes à l’âme très élevée qui sont eux-mêmes reconnaissants du bien qu’ils font, à ceux à qui ils le font, comme pour les remercier de leur fournir l’occasion de se dévouer."
Ami intime de Sa Majesté le roi Pierre, l’ancien officier de 1870, M. Vesnitch sera reçu avec respect à Boulogne.
Nous rappelons que les œuvres de guerre boulonnaises bénéficient frais déduits du produit du plateau et des places retenues. Si l’entrée est d’ailleurs libre le public doit se mettre en garde contre le manque de places et doit aussi songer que jamais les comités des Œuvres de guerre n’ont eu besoin de tant de concours.
Un insigne-souvenir spécialement édité sera en outre vendu dans la salle 0 fr. 25 à chaque conférence. Le modeste bénéfice que peut donner cette vente ne peut être calculé que si elle est faite à prix fixe (1 pour 0 fr. 25, 2 pour 0 fr. 50, etc.).
Le Télégramme, mercredi 22 novembre 1916. Archives départementales du Pas-de-Calais, PG 9/26.