Archives - Pas-de-Calais le Département
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Fermeture au public

Le déménagement des Archives départementales du Pas-de-Calais débute le 1er septembre 2025, pour une durée de plusieurs mois. À compter du 15 août, les salles de lecture seront fermées au public. Nous espérons pouvoir vous accueillir à nouveau dans la salle de lecture de notre nouveau bâtiment, au n° 5 rue du 19-mars-1962 à Dainville, au cours du premier trimestre 2026, sous réserve de l’avancement du transfert des collections.

Les recherches par correspondance seront également impactées par cette opération. Pour en savoir plus, consultez la page dédiée

Nos cloches sont mortes, mais elles ressusciteront !

Carte postale noir et blanc montrant une cloche d'église au milieu de gravas.

Ruines de la Grande Guerre 1914-1918. Arras (Pas-de-Calais). - Le Bourdon de Saint-Jean-Baptiste. - E.C. Archives départementales du Pas-de-Calais, 38 Fi 384.

Les destructions subies à Arras depuis la déclaration de guerre sont sans commune mesure avec les dommages causés par les précédents conflits. Soupçonnés de servir de point d’observation aux artilleurs ennemis, les clochers sont fréquemment victimes de destructions volontaires. Considérées comme des crimes, celles-ci affectent profondément la population et alimentent une propagande où ces monuments religieux jouent un rôle actif dans l'exaltation des sentiments patriotiques.
À l’aube de la reconstruction, 248 dossiers de demandes d’indemnités concernent des églises. Et sur ces 248 églises, 235 sont complètement détruites ou fortement endommagées.

L'attachement de la population arrageoise aux chefs-d’œuvre de son patrimoine s’exprime ici à travers ses cloches. Outre leur fonction liturgique, ces dernières ont toujours uni les vivants dans le sentiment d’appartenir à une communauté bien identifiée et ont assumé des fonctions sociales, en défendant la population contre ses ennemis, en la convoquant ou en l’accompagnant durant ses fêtes et ses rituels.
L’association des cloches et de la paix semble ici se confondre avec l’histoire même : rappelons qu’en août 1914, tous les clochers de France retentissaient tandis que les Français découvraient sur les portes de leur mairie l’ordre de mobilisation générale qui allait envoyer des millions d’hommes se battre sur le front.

La Grande Guerre va infliger des destructions considérables aux lieux de culte des six paroisses du doyenné d’Artois : les cinq clochers de la paroisse Notre-Dame-en-Cité, deux des trois clochers de la paroisse Notre-Dame des Blancs-Monts et trois des huit clochers de la paroisse Notre-Dame de Pentecôte.
Bien qu’invisibles la plupart du temps, les cloches sont de véritables œuvres d’art, souvent ornées de dates, de motifs et de textes courts, qui révèlent quand, pourquoi et par qui elles ont été fondues ; les blasons représentent les armes de la ville et les décorations sont des signes religieux, des symboles de pouvoir ou des motifs naturalistes. Fortement convoitées pour leur bronze, ces cloches seront largement enlevées et fondues dans les communes occupées, pour fournir la matière première de l’industrie d’armement allemande.

Nos cloches sont mortes, mais elles ressusciteront !

Oui ! nous aimions les cloches de la capitale artésienne, quand, aux "jours nataux", c’est-à-dire aux grandes fêtes, elles jetaient vers le ciel leurs joyeux appels, invitant les chrétiens à venir prier le Créateur.

La Révolution ne nous avait laissé que quelques cloches anciennes, notamment la "Salvator". Mais aussitôt la tourmente passée la générosité des bourgeois d’Arras avait repeuplé les clochers relevés de leurs ruines.

L’église de Saint-Nicolas-sur-les-Fossés, préservée du marteau démolisseur par suite de son affectation comme temple de la déesse raison, après avoir été purifiée des souillures jacobines, était devenue cathédrale provisoire sous le vocable de Saint-Jean-Baptiste jusqu’à l’inauguration en 1833 de la cathédrale qui devait avoir le sort de celle de Reims.

Napoléon, à son passage à Arras, avait décrété l’achèvement de l’imposante chapelle des bénédictins de Saint-Vaast, pour servir de cathédrale.

Sous la Restauration, sur l’emplacement de l’antique et à jamais regrettée cathédrale gothique, l’église de Saint-Nicolas avait surgi. Celle de Saint-Géry fut construite en 1866 par le général architecte Grigny, pour remplacer la chapelle trop exiguë de l’ancienne abbaye des Dames du Vivier aujourd’hui hospice de vieillards.

Non loin de l’emplacement de l’ancienne église Saint-Étienne, Mgr Lequette avait érigé, en 1876, la basilique Notre-Dame-des-Ardents, dont les cloches n’étaient pas moins vibrantes que celles inaugurées à Saint-Jean-Baptiste par le chanoine Gherbrandt.

Outre ces paroisses, le chef-d’œuvre à Arras de Grigny – auteur également de l’élégante flèche et de la chapelle des Ursulines – la chapelle du Saint-Sacrement, si bien restaurée par le vaillant évêque d’Arras et détruite stupidement par les Vandales, avait son délicieux carillon, lançant aux heures et aux demi-heures, son : "Adoremus in aeternum !".

Enfin les cloches des hospices, des orphelinats, des communautés, aujourd’hui muettes, écrasées par les destructeurs de cathédrales, mêlaient leurs voix modestes au grand concert campanaire.

Tout cela n’est plus, il est vrai, qu’un cruel souvenir ! Successivement, avec un acharnement de Boches, les Teutons ont fait taire nos cloches !

La Croix du Pas-de-Calais, samedi 1er janvier 1916. Archives départementales du Pas-de-Calais, PE 135/18.