Fermeture de la salle du centre Georges Besnier (site d'Arras)
Pour toute recherche dans les fonds qui y sont conservés (archives contemporaines), la consultation aura lieu dans la salle de lecture du Centre Mahaut-d’Artois, à Dainville. Deux levées sont organisées par semaine :
Pour une consultation de vos documents à partir du lundi matin, la commande des cotes doit être passée au plus tard le jeudi précédent, à 12h ;
Pour une consultation à partir du mercredi matin, la commande des cotes doit être passée au plus tard le mardi précédent, à 12h.
Le nombre de commandes est limité à 10 par jour et par personne. Le système de navette nécessitant une organisation rigoureuse et de nombreuses manipulations, il est essentiel de venir consulter les documents commandés avant la fin de la semaine, après quoi ils seront rangés.
Portrait de soldats et de cuisiniers militaires attablés, [1890-1915]. Archives départementales du Pas-de-Calais, 4 Fi 2262.
Portrait de soldats et de cuisiniers militaires attablés, [1890-1915]. Archives départementales du Pas-de-Calais, 4 Fi 2262.
Lorsque débute la Grande Guerre, le vin est un produit de consommation quotidien en France, au même titre que le pain. Dans les années 1910, la consommation des français est alors de 60 millions d’hectolitres de vin par an, ce qui représente une moyenne de 105 à 120 litres de boissons alcoolisées par habitant. De fait, pendant la guerre, le vin fait partie, avec le tabac et le café, des produits indispensables du ravitaillement non alimentaire, qui bien que non indispensable pour vivre est très recherché.
Or la mobilisation des hommes qui participent de la production des vins et bières françaises, et de même que l’occupation ou la destruction des cultures viticoles et des distilleries, notamment dans le nord et l’est de la France, entraînent une baisse de la production française. Dans le même temps l’utilisation du vin pour soutenir le moral des unités combattants sur le front accroît sa consommation en assurant à chaque soldat une quantité de vin dans ses rations quotidiennes (25 cl par jour et par soldat en octobre 1914).
Pour compenser une production viticole française insuffisante, issue alors majoritairement du Languedoc-Roussillon, la France importe des vins étrangers, essentiellement d’Espagne, pour satisfaire les troupes armées, comme les populations civiles. Si ces importations limitent les pénuries de cette denrée, les prix augmentent considérablement du fait des frais et conditions de transport : éloignement géographique entre lieux de production et lieux de consommation, manque de moyens de locomotions réquisitionnés, limitations et contrôles des circulations de biens et de personnes surtout dans les régions des combats, etc. ; auxquels s’ajoutent la spéculation dont cette denrée fait l’objet puisque très recherchée.
Les consommateurs font les frais de ces hausses de prix d’un produit dont ils n’envisagent pas de se passer. Début juin 1917, le Télégramme publie plusieurs articles faisant état du mécontentement et de l’incompréhension des consommateurs de bières et de vins de Saint-Omer face aux pratiques des commerçants de la ville : augmentation du prix, baisse de la taille des contenants, etc.
La chope à trois sous
Une petite révolution vient de s’accomplir, moins tragiquement qu’en Russie dans le monde, assez nombreux à Saint-Omer comme dans toutes les villes de la région, qui fabrique de la bière, qui en vend et qui en boit.
Par suite d’une décision prise après s’être entendus en réunion, les brasseurs de notre ville viennent de porter le prix de la bière à 42 francs la tonne de 150 litres pour les débitants de sorte que le prix s’en trouve doublé, comme du reste celui de beaucoup de denrées et marchandises, depuis la guerre.
La conséquence de cette mesure, c’est que les cafetiers et cabaretiers se sont vus dans l’obligation d’augmenter eux aussi leurs prix de vente et le prix de la chope traditionnelle qui, de temps immémorial, ne coûtait ici que dix centimes, excepté dans deux ou trois grands établissements, est en train de passer à quinze centimes presque dans tous les débits.
Bien que préparé à tous les sacrifices, le consommateur qui comme toujours, est le plus atteint dans l’affaire car il n’a lui, aucun moyen de compenser ce surcroît de dépense, récrimine un peu, ces premiers temps, comme on peut croire.
Il rappelle, comme le vieillard d’Horace, louangeur du temps passé, l’époque lointaine des grands récipients d’antan, digues du Gambrinus, qu’on appelait des "glaces" quand elles étaient en verre, des "triboulettes" des "pintes à manche" quand elles étaient en faïence et qui contenaient largement leur demi-litre d’une bière limpide nourrissante et mousseuse que notre génération ne connaît plus.
Il les compare amèrement aux "tulipes" ou petits "ballons" aux "mousselines" ou aux "demoiselles" ̶ pincées à la taille et à haut faux-col ̶ et de si faible contenance "qu’on n’a pas le temps d’en sentir le goût !"
Les amateurs de bière déplorent en outre que la qualité ne remplace pas la quantité, ce qui est compréhensible étant donné le coût actuel du malt où il entre maintenant plus d’orge que de scourgeon et du houblon en train de passer à l’état de mythe.
Malgré cela, la révolution de la bière s’opérera pacifiquement sans autre effusion que celle d’un flot de paroles et, la chaleur qui commence aidant, nos bons buveurs, n’en absorbent pas un seul verre de moins.
ZOUAFQUES
Le Télégramme, mardi 5 juin 1917. Archives départementales du Pas-de-Calais, PG 9/27.
Le vin cher
Au début de la guerre, le vin de table, dit bon ordinaire, se vendait 60 à 70 centimes le litre ; il passa successivement à 0,80, 0,90 et 1 franc. A ce moment pour varier les plaisirs, les marchands de vins déclarèrent à leurs clients que la verrerie comme le vin devenant rares, ils étaient obligés de réduire le contenant tout en augmentant le prix du contenu et vendirent le vin en question un franc… la bouteille.
Aujourd’hui, le règne du litre est passé comme celui de la chope à deux sous, pour faire place à la modeste "bordelaise". Encore une restriction de plus à ajouter aux autres.
Mais le prix de la bouteille de vin a continué de monter, de monter toujours comme une marée et on ne voyait aucune raison pour que cette ascension s’arrête et le consommateur qui n’a qu’un choix à faire entre prendre ou laisser, paye sans murmurer car toute protestation serait inutile. C’est ainsi que le vin courant coûte actuellement à Saint-Omer, 1 fr. 50 la bouteille au minimum et jusqu’à 2 francs chez certains détaillants, c’est-à-dire beaucoup plus cher que dans la plupart des villes de France, d’après les tableaux et les statistiques récemment parus.
D’où vient cette hausse prodigieuse ? de la cherté du vin aux pays d’origine, expliquaient nos marchands, et de la rareté des arrivages par suite du manque de transports.
Or, d’une part, tout le monde peut lire dans les mercuriales que publient les journaux que les prix des vins dans le midi ne sont pas aussi exorbitants qu’on veut bien le dire.
D’autre part, en ce qui concerne les difficultés de transport, si les arrivages par chemin de fer laissent encore à désirer, il semble que ceux effectués par bateaux sont satisfaisants.
Il est arrivé notamment, il y a quelques jours par la Barque (service entre Dunkerque et Saint-Omer) au quai du Commerce, un plein bateau de 38 mètres ne contenant que du vin, ce qui constitue un nombre respectable de pièces ou de tonneaux de divers calibres à destination des commerçants en vins de notre ville.
Ils ne peuvent contester que le vin leur arrive ̶ par eau ̶ en ce moment, en grande quantité et que les ennuis des expéditions de vins par voie ferrée qui leur étaient imposées naguère, non plus en cercles, mais en bonbonnes et en bouteilles dont ils se plaignaient, n’existent plus pour eux grâce à ces gros arrivages par le canal.
Et alors ? Alors nous espérons bien que nos marchands vont se décider à baisser le prix du vin et à ne plus le tenir à un tarif excessif et inabordable pour les petites bourses.
Le Télégramme, mardi 12 juin 1917. Archives départementales du Pas-de-Calais, PG 9/27.