Archives - Pas-de-Calais le Département
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Fermeture de la salle du centre Georges Besnier (site d'Arras)

Pour toute recherche dans les fonds qui y sont conservés (archives contemporaines), la consultation aura lieu dans la salle de lecture du Centre Mahaut-d’Artois, à Dainville. Deux levées sont organisées par semaine :

  • Pour une consultation de vos documents à partir du lundi matin, la commande des cotes doit être passée au plus tard le jeudi précédent, à 12h ;
  • Pour une consultation à partir du mercredi matin, la commande des cotes doit être passée au plus tard le mardi précédent, à 12h.

Le nombre de commandes est limité à 10 par jour et par personne. Le système de navette nécessitant une organisation rigoureuse et de nombreuses manipulations, il est essentiel de venir consulter les documents commandés avant la fin de la semaine, après quoi ils seront rangés.

La commande se fait via notre formulaire de contact.

Nous vous prions de nous excuser pour la gêne occasionnée et vous remercions par avance de votre compréhension.

Le traité de paix de Versailles

Par les quatorze points de son programme de paix, présenté devant le Congrès le 8 janvier 1918, le président des États-Unis Thomas Woodrow Wilson (1856-1924) entend rappeler le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et préconiser une nouvelle organisation du monde.
Tout en prévoyant le retour de l’Alsace-Lorraine à la France, il souhaite ménager l’Allemagne, pour éviter tout esprit de revanche et pour retrouver un partenaire économique. La convention d’armistice du 11 novembre a pour but de mettre cette dernière hors d’état de reprendre la guerre, en l’obligeant à livrer une part importante de son matériel de guerre, de son matériel de transport et de sa flotte, puis de lui faire évacuer les territoires envahis et rapatrier les prisonniers de guerre alliés, le sort des prisonniers allemands ne devant en revanche être réglé qu’au moment de la conclusion des préliminaires de paix.

Le 28 juin 1919, à Versailles, est signé le traité de paix, qui met réellement fin à l’état de guerre.

Le traité a été signé, avec réserves, par deux membres du gouvernement allemand, le ministre des Affaires étrangères Hermann Müller et le ministre des Transports Johannes Bell. L’Assemblée nationale allemande en vote l’adoption par 237 voix contre 138 pour éviter l’occupation. Il est perçu comme dur et injuste par la plupart des Allemands, dans ses clauses de sauvegarde (occupation de la rive gauche du Rhin et de trois têtes de pont sur la rive droite pendant quinze ans, démilitarisation de la Rhénanie), mais surtout parce qu’il en fait les seuls responsables du conflit.

En France, si la paix est globalement acceptée, certains secteurs de l’opinion publique considèrent comme insuffisantes les garanties obtenues contre un retour offensif de l’Allemagne : le vote de la Chambre des députés est toutefois acquis le 2 octobre 1919, celui du Sénat le 11 octobre 1919. Mais dans la presse, les critiques et regrets se multiplient. Cette déception est particulièrement virulente dans les régions dévastées, comme en témoigne l'article de Gabriel Aymé paru le 26 juillet 1919 dans Le Lion d'Arras, ce qui lui vaut d'être partiellement censuré : 

La paix est signée

C’est fait ; nous n’avions jamais nourri l’espoir que les Allemands refuseraient la signature ; nous avions trop intérêt à ce refus ; huit jours d’opérations, qui n’auraient pas rencontré de résistance, nous eussent permis de revenir sur les trop fameux Quatorze Points, acceptés follement par les gouvernants alliés, à la veille de la capitulation allemande.

De l’illustre président Wilson mieux vaut ne plus parler ; il sera considéré par l’histoire [censure] ; ce disant, je suis indulgent ; je veux croire au désintéressement américain, en 1918 comme en 1919 ; beaucoup d’Américains, d’ailleurs, ont prouvé ce désintéressement ; de leur président, je préfère me borner à répéter les vers du grand Corneille : [censure].

Je n’ai pas la place de donner ici une analyse du traité de paix ; il nous rend l’Alsace et nous promet quelques réparations ; c’était bien le minimum que nous pussions en attendre ; mais :

  1. Il nous refuse les frontières militaires solides qui nous eussent permis de supprimer, chez nous comme chez les autres, le service militaire obligatoire ;
  2. Il dispense les Allemands de payer les frais de la guerre, qui nous coûtera ainsi plus de deux cent milliards ; à tel point que demain les charges financières qui pèseront sur chaque Allemand (4 000 francs) seront près de la moitié de celles qui pèseront sur chaque Français (7 000 francs).
  3. Il nous enlève les prisonniers dont nous avions un besoin absolu pendant cette première période.

Les alliés ont eu la faiblesse de se refuser à considérer les Allemands comme le commerçant failli dont on liquide les biens ; l’Allemagne va passer quelques années pénibles, c’est entendu ; mais dans dix ans, peut-être moins, il sera plus agréable d’être allemand que d’être Français ; tel est le résultat de la Grande Guerre victorieuse.

Nous avons pavoisé pour l’armistice ; mettons un crêpe à notre drapeau ; ou mieux, abstenons-nous ; gardons le silence et le calme ; et – puisque toute démonstration serait inutile – résignons-nous à la paix indigne de la victoire.

Gabriel Aymé

Le Lion d’Arras, jeudi 26 juin 1919. Archives départementales du Pas-de-Calais, PF 92/2.

D'autres journalistes déplorent également la situation en utilisant d'autres arguments pour accabler le gouvernement : 

La paix est signée

Oui, mais la guerre n’est pas finie pour nous, les « glorieux » sinistrés ! À l’heure où la République allemande accepte le traité que lui imposent les puissances alliées, il serait de mauvais ton, peut-être, de critiquer ce document… extraordinaire.

Ce qu’il faut dire cependant, avec tristesse, c’est que la guerre finit trop tard. Si le gouvernement eût écouté à la fameuse séance à huis clos de 1917 M. Briand, ancien président du Conseil, le massacre aurait cessé il y a deux années.

La Paix qu’on nous offrait à l’époque était une vraie victoire. Elle aurait épargné à la France et à l’Europe quelques millions de cadavres et quelques centaines de milliards de dépenses.

Et par surcroît la France, encore très forte alors, aurait pu parler haut à la Conférence de la Paix de 1917, on l’aurait entendue et écoutée. On a préféré continuer la bataille. On a fait la guerre. Et c’est une France victorieuse encore, mais affaiblie et ruinée, qui s’est présentée à la Conférence de 1919.

Quel dommage ! Quelle erreur ! Quel regret ! Nous pouvons le clamer, nous autres les vrais vaincus de l’horrible carnage, nous autres à qui il reste des ruines à réparer et des yeux pour pleurer.

G.B.

Le Pas-de-Calais libéré, jeudi 26 juin 1919. Archives départementales du Pas-de-Calais, PG 55/1.

Le 14 juillet 1919, deux semaines après la signature, un défilé militaire d’une ampleur sans précédent marque la fin de la Grande Guerre pour la France. L'opinion publique est partagée : une partie des Français se réjouit de la fin de la guerre et manifeste bruyamment son soulagement, tandis que d'autres (principalement ceux qui ont le plus souffert) se refusent à participer aux réjouissances. Voici quelques exemples relevés dans la presse du Pas-de-Calais :

Cloches, drapeaux, canons…

Le maire de Saint-Laurent-Blangy, dont, on le sait, il ne reste que des ruines, a reçu une note du Ministre, l’invitant à « faire sonner les cloches à toutes volées », à illuminer et pavoiser tous les édifices  et à s’entendre avec l’autorité militaire « pour que le canon soit tiré au maximum » ; le Ministre oublie que pendant quatre ans le canon a été tiré chez nous « au maximum » ; ce maximum nous  suffit pour quelques temps ; quant aux drapeaux, nous les accrocherons aux premiers pans de murs que le Ministre nous aura reconstruits.

 Le Lion d’Arras, jeudi 26 juin 1919. Archives départementales du Pas-de-Calais, PF 92/2.

La paix à Arras

Jour de paix terne à Arras. Nos gens ont compris qu’ils n’avaient pas le droit de se réjouir devant l’étendue de leurs ruines et l’impéritie des pouvoirs publics. Les drapeaux, les coups de canon à blanc, les farandoles, le champagne, tout cela c’est bon pour l’autre France et pour sa capitale Paris, pour ce Paris dont les habitants, il y a douze mois, décampaient comme des lapins, sous la menace des Boches et de leurs Berthas.

Nos sinistrés ont autre chose à faire qu’à godailler. Il leur faut redoubler d’ardeur en vue de l’hiver prochain. Et quel hiver, s’il faut le passer dans des baraques en planches ou des maisons trouées. Nous ne fêterons la paix chez nous que dans dix ans…

Le Pas-de-Calais libéré, jeudi 3 juillet 1919. Archives départementales du Pas-de-Calais, PG 55/1.