Qu’est devenu le cartulaire de l’évêché d’Arras ?

Les feuillets récemment retrouvés

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Folio 153 du cartulaire de l'évêché, 1252-1264, copie ; [128.], Archives départementales du Pas-de-Calais, 3 G 36. 

Folio 153 du cartulaire de l'évêché, 1252-1264, copie ; [128.], Archives départementales du Pas-de-Calais, 3 G 36. 

Les cinq feuillets retrouvés sont des pièces de parchemin de dimensions comparables (30,5 × 22 cm), foliés en chiffres romains au recto selon le système vicésimal en usage au Moyen Âge (par exemple, le folio 153 est noté VIIxx XIII, soit 7 × 20 + 13). Ils portent les numéros 91, 153, 286, 287 et 290. La graphie, l’ornementation et la mise en page permettent de les dater du XIIIe siècle, plus précisément du dernier tiers du siècle, époque de forte production documentaire dans les institutions ecclésiastiques.

L’écriture est une gothique soignée, tracée à l’encre brune. Chaque rubrique débute par une lettrine polychrome, en vermillon et outremer, selon un procédé de décoration relativement inhabituel pour un cartulaire, ces recueils étant généralement peu enluminés. Les textes sont rédigés majoritairement en latin, avec quelques passages en ancien français pour les pièces les plus tardives.

Le contenu des feuillets atteste leur provenance épiscopale : droits sur un moulin (fol. 290), affaires de dîmes (fol. 153), chartes relatives aux abbayes d’Étrun ou d’Eaucourt (ff. 91 et 153), et même un fait divers judiciaire rapporté au folio 285, où l’évêque restitue un cheval confisqué après un homicide. Cette diversité documentaire est typique des cartulaires épiscopaux, qui avaient pour fonction de garantir les prérogatives temporelles et spirituelles de l’évêché.

Le cartulaire de l’évêché d’Arras : état ancien et description

Nous devons la connaissance matérielle de ce manuscrit à Adolphe Guesnon (1824–1917), historien et archiviste local, qui en publia une description en 1902. À cette date, le cartulaire se présentait comme un volume de 445 feuillets, dont la reliure du XVIe siècle consistait en deux ais de chêne recouverts de peau de truie, ornés de bouillons de cuivre fixés sur des plaques en croix fleuronnée. Les fermoirs d’origine avaient disparu, à l’exception de leurs clous d’arrêt. Ce cartulaire avait pour titre Registrum kartarum et privilegiorum ad episcopatum Attrebatensem pertinentium.

L’analyse de son contenu indique que la première partie du cartulaire (182 feuillets) fut compilée entre 1280 et 1283, durant une vacance épiscopale, et ne contient que des actes antérieurs à 1280. Par la suite, plusieurs cahiers furent ajoutés, entre 1391 et 1551. Les copistes de cette seconde phase imitèrent le style gothique du XIIIe siècle, mais la qualité calligraphique et ornementale y est moindre.

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Folio 285 du cartulaire de l’évêché d’Arras, 1358 (13 juin), Archives départementales du Pas-de-Calais, 3 G 36. 

Folio 285 du cartulaire de l’évêché d’Arras, 1358 (13 juin), Archives départementales du Pas-de-Calais, 3 G 36. 

Avant la Révolution, le cartulaire était conservé dans une salle sécurisée de l’ancienne cathédrale d’Arras, aménagée entre deux voûtes, dotée de dispositifs de blindage aux portes, fenêtres et cheminée. Après 1789, la majorité des archives ecclésiastiques fut versée aux archives départementales, alors installées dans le palais Saint-Vaast ( sous-série 3 G), mais le cartulaire demeura dans les mains de l’autorité épiscopale.

La disparition et les hypothèses

La disparition du cartulaire survint pendant la Première Guerre mondiale, sans qu’aucune source ne permette d’en préciser les circonstances. En 1951, les premiers feuillets isolés réapparurent en Allemagne. Le docteur Anton Carl Frederic Koch (1823–1990), bibliothécaire et archiviste à Deventer, en avait récupéré plusieurs, à Cologne (les folios 45 et 53) puis à Leipzig. On ne sait ce qu’est devenue sa collection après son décès.

En 2019, le folio 153 a été retrouvé à Londres par les archives départementales du Pas-de-Calais. Puis en 2024, le folio 91 a été localisé à Milton Keynes (Buckinghamshire), tandis que les folios 285, 286 et 290 étaient identifiés à Berlin.

Plusieurs hypothèses ont été avancées pour expliquer la dispersion du cartulaire. Arras, bien que située à proximité du front, ne fut pas occupée par les troupes allemandes, ce qui rend improbable un pillage direct. L’historien Bernard Delmaire suggère que le manuscrit était conservé en 1914 par le chanoine Édouard Fournier (1873–1954), official du diocèse, originaire de Bapaume — localité effectivement occupée. Un vol opportuniste par un soldat allemand est ainsi plausible.

Le cartulaire de l’évêché d’Arras constitue une source essentielle pour l’étude de l’histoire locale, de l’organisation ecclésiastique et des dynamiques sociales et économiques dans le nord de la France au Moyen Âge. Dispersé au gré des aléas de l’histoire, ce manuscrit, longtemps considéré comme perdu, fait aujourd’hui l’objet d’une reconstitution progressive dans son lieu d’origine. Le présent article se veut une modeste contribution à cet effort, en espérant que sa diffusion permettra de faire émerger d’autres fragments non encore localisés de ce précieux document.

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Atrebates. Evesché d'Arras, comté d'Artois, subdivisé en toutes ses juridictions [...]. Carte (1656), Archives départementales du Pas-de-Calais, 4 J 436/88.

Atrebates. Evesché d'Arras, comté d'Artois, subdivisé en toutes ses juridictions [...]. Carte (1656), Archives départementales du Pas-de-Calais, 4 J 436/88.